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Le livre de Gregory Derville: Réussir la transition écologique

 

Depuis quand t’intéresses-tu à la transition écologique, et comment en es-tu venu à écrire ce livre, Réussir la transition écologique ?

Je suis un écolo tout ce qu’il y a de plus banal depuis très longtemps, et dans ma vie quotidienne je multiplie les « petits gestes » écocitoyens qui sont, comme on le sait bien, à la fois indispensables mais très insuffisants.

Dans mon activité d’enseignant en science politique à l’Université de Lille, je donne notamment des cours sur la crise écologique et ses conséquences sociales, économiques, financières ou sanitaires, sur l’éthique écologique, sur les politiques environnementales et de durabilité, etc. Je dois dire que c’est assez éprouvant de sans cesse se confronter à des informations très anxiogènes, qui montrent que la situation écologique et sociale se dégrade très fort et très vite. Du coup quand j’ai découvert il y a quelques années la permaculture, je m’y suis tout de suite intéressé, car elle m’a permis d’envisager l’avenir sous un jour moins sombre, plus constructif. En effet, la permaculture nous invite à concevoir, à mettre en œuvre et à faire fonctionner des « écosystèmes habités » qui sont inspirés par la nature, et qui de ce fait fonctionnent de façon beaucoup plus efficace, résiliente, durable, etc., que ceux qui font le quotidien des sociétés « modernes ». Il y a deux ans, j’ai publié un livre sur la permaculture chez Terre vivante (La permaculture. En route vers la transition écologique). Ce livre présente les éthiques et les principes de la permaculture, la méthodologie du design permaculturel, les critères à prendre compte pour choisir telle technique plutôt que telle autre, etc. C’est un guide pour apprendre à « penser permaculture », à se poser les bonnes questions et à trouver soi-même les bonnes réponses, pour pouvoir vivre de façon plus durable et respectueuse de nous-mêmes et de notre environnement humain et naturel.

Parallèlement à ton métier d’enseignant, tu as participé à la création d’un collectif associatif et citoyen à Beauvais (Beauvais en transition).

C’était en 2012, à l’issue de la projection du film Cultures en transition au cinéma associatif de la ville.

Nous regroupons une grosse vingtaine d’associations qui mettent en œuvre des actions de sensibilisation, des ateliers de partage de savoirs et de savoir-faire, etc. Le collectif se veut en quelque sorte une « maison commune » à toutes ces associations et à tous les acteurs du territoire qui se reconnaissent dans les valeurs et les objectifs de la transition écologique, pour leur offrir davantage de visibilité, un socle commun (nous avons par exemple une charte), pour mutualiser certaines actions… Ces derniers mois, ce collectif a rédigé un Livre blanc pour peser sur le déroulement de la campagne des élections municipales, et pour faire des propositions concrètes pour la prochaine mandature. Ce travail a été fait sur la base de plusieurs centaines de contributions collectées auprès des habitants. Je n’ai pas participé au groupe qui a réalisé ce Livre blanc, alors je suis d’autant plus à l’aise pour dire que je suis  épaté par le résultat.

Comme le premier livre sur la permaculture a été très bien reçu et a très bien marché, nous avons pensé, avec mon éditrice, que ce serait intéressant d’en publier une deuxième sur les aspects plus collectifs de la permaculture, en s’inspirant des expériences qui ont cours un peu partout dans le monde, et aussi de ce que nous essayons de faire à Beauvais. C’est comme ça que j’ai rédigé Réussir la transition écologique, qui est paru en octobre dernier.

 

Quel est le contenu de ce livre ?

Quand je parle de la crise écologique, de l’ampleur gigantesque des changements qu’il va falloir mettre en œuvre pour, tout simplement, préserver une Terre habitable, on me dit très souvent « OK, il faut changer, mais qu’est-ce qu’on peut faire ? » La prise de conscience s’accroît, sans doute, mais j’observe aussi un très fort sentiment d’impuissance, de désarroi : les enjeux sont gigantesques, ils sont lointains, ça nous dépasse, et en plus on ne peut pas grand-chose, individuellement, sur les stratégies et les activités des multinationales ou des Etats, surtout quand c’est à l’autre bout du monde… Et puis il y a aussi l’impression, quand on est très sensibilisé, que pas grand monde autour de soi ne l’est, qu’on n’arrive pas à alerter et à susciter des changements de comportements chez ses proches, ses voisins, ses élus, etc. Pour toutes ces raisons, beaucoup de personnes se sentent accablées, découragées.

Le but de ce livre, c’est de fournir une piste d’action possible, parmi d’autres : agir concrètement, sur son territoire, pour le rendre plus résilient à la crise écologique, au dérèglement climatique, à la raréfaction des énergies fossiles et des métaux, à l’effondrement de la biodiversité, etc. Et même, si possible, pour faire en sorte que le territoire sur lequel on vit contribue à enrayer cette crise écologique.

En fait le public cible de ce livre, ce sont les personnes qui souhaitent s’engager en faveur de la transition écologique dans leur environnement proche, qui veulent agir concrètement pour faire changer les choses, mais ne savent pas bien par quoi commencer ou comment faire. Des gens qui se posent la question « Que faire et comment faire pour engager la transition écologique près de chez moi ? », qui ont une forte envie et une forte motivation pour agir, mais qui ont l’impression qu’ils manquent de connaissances ou de compétences pour être efficaces, ou qui ne savent pas par quoi commencer…

Ce livre est inspiré par le Manuel de transition de Rob Hopkins, et il se donne pour objectif de l’actualiser et de l’adapter au cas français. Dans une première partie, je décris les grands principes de la transition écologique (inclusivité, accent mis sur l’action et les solutions, volonté de développer les savoir-faire…), et je donne des outils concrets pour créer ou amplifier la dynamique de la transition écologique sur un territoire précis : comment sensibiliser le grand public, comment créer des synergies avec le tissu associatif existant, comment faire vivre des collectifs militants de façon efficace et démocratique, comment impliquer les élus et les acteurs économiques, etc.

 

Ce livre présente aussi des structures collectives qui peuvent transformer le fonctionnement d’un territoire ?

Oui, c’est une des différences avec le Manuel de Rob : dans la troisième partie du livre, je décris 9 structures telles que l’espace-test agricole, le magasin de producteurs, le jardin d’insertion, le Repair cafés, la recyclerie, l’atelier vélo participatif, la magasin coopératif, l’habitat groupé, la monnaie locale… À chaque fois, je présente de façon détaillée les raisons pour lesquelles ces structures sont pertinentes, quelques exemples déjà existants, la marche à suivre, les erreurs à ne pas commettre, les réseaux de soutien aux porteurs de projet, les sources de financement possibles, etc. Au final, ce livre est en quelque sorte un « guide pratique de la transition écologique près de chez vous ».

Comme pour le premier livre, j’ai fait très attention à ce que l’écriture soit simple et claire, parce que je tiens à ce que n’importe qui puisse se l’approprier, y compris des gens qui ne connaissent pas bien l’écologie, ou qui n’y sont pas sensibilisés. Il y a beaucoup d’encadrés, de photos, de dessins, de schémas… Je voulais que ce soit un livre très pédagogique, que l’on peut mettre entre les mains de son conjoint, d’un ami, d’un élu local, etc.

 

Tu donnes des conférences et des formations un peu partout en France sur ces questions ?

Oui, et je le fais avec de plus en plus de plaisir, d’autant plus que je constate un intérêt grandissant pour la permaculture, pour la transition écologique (et pour l’effondrement, ce dont je parle aussi, car il est pour moi très important de fonder la réflexion et l’action sur une observation lucide de la réalité, dans ce qu’elle a de très inquiétant).

J’interviens dans des salons du livre ou des salon bio, ou à l’invitation d’associations qui ont envie de faire découvrir ces thèmes à leurs adhérents et au public local. Le thème varie, ça dépend de ce qu’on me demande, du public, du contexte… En ce moment c’est beaucoup pour intégrer les enjeux écologiques dans la campagne des élections municipales, pour soutenir les efforts des listes engagées en faveur de la transition…

Depuis un an, j’ai aussi animé des formations de plus longue durée sur la permaculture et/ou la transition écologique, pour le compte de collectivités, d’entreprises réunies en séminaire. Dernièrement je suis intervenu pendant 3 demi-journées dans une formation organisée par l’Union régionale des CPIE de Franche-Comté, c’était passionnant. Cela me permet de toucher des publics différents, de diffuser des connaissances, de recueillir des témoignages, etc. J’aime beaucoup ça. Je me suis amusé à faire une petite carte des endroits où je suis déjà allé (en train, je le précise!) : ça commence à faire un tour de France assez sympa, d’autant plus sympa que je me suis fait des amis.

 

Merci Grégory pour cette présentation et ce livre  Reussir la transition écologique !

Merci Kitty, et bravo pour tout le travail que tu abats pour faire vivre ce site internet !

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